En tant qu’enfants d’une mère homosexuelle et en réponse à tous ceux qui prennent la parole à notre place, nous demandons aujourd’hui à être entendus.
L’argument de la place de l’enfant semble être la principale raison du refus de l’ouverture au mariage pour tous.
Il est judicieux de se questionner sur la véracité de cet argument. Un enfant peut-il être éduqué correctement, avoir des principes et des valeurs justes et surtout peut-il être psychologiquement équilibré s’il ne grandit pas dans un modèle parental, dit classique, avec un père et une mère?
Cet argument, imparable pour les opposants au mariage homosexuel, n’est-il pas hypocrite et ne cache-t-il pas une forme d’homophobie?
Il n’est pas commode de s’assumer homophobe, c’est se révéler sectaire et non républicain. Utilisons donc ce que nous avons de plus cher pour justifier l’intolérance.
Il est sain de s’interroger et de soulever le problème de l’enfant. Ce qui est moins compréhensible est son silence et la place qu’on lui laisse dans le débat.
Il existe pourtant des personnes élevées par des couples homosexuels, enfants adoptés ou conçus au sein des ces couples, enfants de parents divorcés dont le père ou la mère est homo. Nous sommes là ! Nous savons nous exprimer, nous pouvons partager notre expérience. nous avons notre propre avis.
Pourquoi ne nous entend donc pas? Pourquoi aucun acteur du débat (ou si peu) nous présente? Pourquoi quasiment aucun média n’a eu l’idée d’aller à notre rencontre? Sommes-nous placés hors du dialogue volontairement? Peut-être pourrions-nous montrer un visage heureux et sain? Ou peut-étre sommes-nous instables et remplis de complexes?
Nous sommes un frère et une sœur, éduqués par une mère homosexuelle. Nous avons vécu avec un couple de femmes une grande partie de notre enfance et toute notre adolescence. Nos propres enfants grandiront avec un exemple de couple homosexuel dans la famille.
Nous n’avons aucune prétention à dire ce qui est bien ou non. Nous souhaitons juste faire savoir que l’utilisation de l’argument de l’enfant n’est pas recevable s’il est avancé par des personnes n’ayant pas eu cette expérience. Qui sont ces gens qui parlent à notre place? Qui nous représente réellement? Les pères de l’Église Catholique ? M. Copé ou M. Fillon ? L’anonyme qui a un ami qui a un ami homosexuel ? Les personnalités politique qui nous voient comme des électeurs potentiels ?
Nous souhaitons faire entendre notre voix car nous nous sentons insultéé, stigmatisés et marginalisés.
Sommes-nous déséquilibrés ? Avons-nous eu une enfance qui fait que nous ne serons jamais stables ? Avons-nous été privés d’amour ? Privés de la présence d’un père ? Sommes-nous incapables de savoir ce qu’est une famille hétéroparentale, incapables de reproduire un environnement familial ? Avons-nous souffert de problèmes d’identité liés à la sexualité de nos parents ?
Sommes-nous tout simplement normaux ?
Nous nous sommes évidemment posé des questions, comme tout un chacun lors de notre construction personnelle. Nous ne pensons pas l’avoir fait plus que n’importe quel autre adolescent.
L’argument du modèle homme/femme ne tient plus non plus lorsqu’on lui oppose le fait que la famille n’est pas uniquement deux adultes et un enfant. la famille, c’est aussi des oncles, des tantes, des cousins, Des grand-parents, des frères, des sœurs, voire même des amis. le cadre familial n’est pas juste trois ou quatre individus vivant reclus entre eux.
L’enfant connait donc le schéma hétérosexuel. il a forcément des échanges avec des personnes qui ont une sexualité et un environnement plus “communément admis”.
Nous avons été aimés, et toutes les personnes qui nous entourent et nous ont entourés, n’ont souhaité que le meilleur pour nous. Cela ne suffit-il pas à faire de nous des personnes épanouies ?
La seule chose qui aurait pu nous déséquilibrer, et c’est l’expérience qui parle, est le regard homophobe d’une sociétéet d’une grande partie de ceux qui la compose.
Toutefois, il est vrai que quelque chose nous différencie de quelques uns:
nous avons appris la générosité, la tolérance et l’altruisme, puisque nous avons évolué en plein cœur de ces principes. Et nous sommes fiers de cette éducation.
Le réel problème est qu’un tel débat éxiste. Il est impensable qu’aujourd’hui encore, des personnes puissent refuser à d’autres le droit de s’aimer, de se le dire, de le symboliser par le mariage. Il est impensable de leur interdire la possibilité de transmettre cet amour à des enfants qui n’ont personne. Ce sont ces enfants les véritables perdants.
Nous demandons donc aujourd’hui que les concernés se fassent entendre, qu’on leur ouvre le débat. Que les politiques ne parlent plus pour eux, que les mééias transmettent leur paroles et que celle-ci soit prise en considération par tous.
Plus nous serons à nous exprimer et à partager, plus nous serons capables d’avoir un point de vue juste. Qu’ils soient pour ou contre le mariage gay et lesbien et, par conséquent l’adoption par des homosexuels (puisqu’il n’est même plus question de PMA), vous devez les entendre, eux seuls sont à même de partager ce qu’un enfant dans cette situation ressent.
Notre avis n’est pas celui de psychiatres, de psychologues ou autres psychanalystes, intermédiaires et sujets à l’interprétation.
Nous ne sommes pas des oiseaux boiteux et argentés avec des “papa” et “maman” tatoués sur les ailes.
Les institutions religieuses, même celles se sentant intimement liées à l’histoire de la France, n’ont pas à se poser défenseurs de la famille. L’enfant a avant tout le droit "à se construire en référence" à deux personnes qui le chérissent et lui inculquent les valeurs de partage, d’amour et de solidarité.
Arrêtons de débattre et d’argumenter avec des principes et des cas de conscience. Laissons s’exprimer l’expérience et la réalité.
ANNE & THOMAS.
source LGBT & tetue